« Lieux de diffusion et compagnies / ensembles : comment réguler ma loi de la jungle ? ” organisé dans le cadre de Think Culture 2024 au centre Pompidou le 10 septembre dernier. Mélanie Perrier, Jérôme Montchal et Anne Monfort ont défendu les positions syndicales sur le sujet de la relation entre les équipes artistiques et les lieux.
Face aux crises budgétaires successives, aux enjeux de la mutation écologique et aux transformations du paysage artistique, la concurrence est de plus en plus forte entre les équipes artistiques, les lieux, les festivals. C’est la raison pour laquelle repenser les relations entre ces acteurs de l’écosystème du spectacle vivant public, ainsi qu’avec les collectivités territoriales et l’Etat, est absolument nécessaire. Le Syndeac a d’ores et déjà initié des réflexions et propositions dans le cadre de ses dernières publications autour du service public de la culture, de la mutation écologique, de la création musicale, etc. Ce travail continu de réflexion en interne alimente ensuite nos débats avec l’ensemble du secteur. Ainsi, nous étions représentés en force à un débat organisé dans le cadre de Think culture en cette rentrée 2024.
Un soutien plus global des parcours artistiques
Le soutien aux artistes doit encore évoluer pour intégrer une vision plus large de leur activité. Il ne suffit plus de se concentrer sur la seule diffusion des spectacles ; la recherche, les projets situés sur les territoires, l’éducation artistique et culturelle, tout cela associé à une démarche écologique, sont autant d’éléments à prendre en compte. Les appels à projets, trop nombreux, souvent initiés par les collectivités territoriales mais aussi par certains services de l’Etat, exacerbent la concurrence entre compagnies et font perdre un temps de travail précieux qui devrait être consacré à d’autres tâches. Il est donc crucial d’adopter une approche à long terme, basée sur des échelles temporelles et géographiques variées.
Les tensions financières et la concurrence entre équipes artistiques
La situation financière marquée par la baisse de la diffusion des spectacles, par le report voire l’annulation de projets de création, cumulée aux effets de l’inflation, menace en premier chef les équipes artistiques. Cette pression économique aggravée accroît une concurrence qui ne devrait pas exister entre structures du service public de la culture.
Dans ce contexte, il devient primordial d’encourager une meilleure répartition des ressources, en veillant à inclure des artistes historiquement marginalisés, notamment les femmes et les personnes racisées. Une régulation plus juste ne signifie pas une réduction des opportunités, bien au contraire : mieux distribuer les moyens doit permettre de garantir une représentativité plus équilibrée.
Parce que le Syndeac rassemble en son sein des lieux de diffusion et de création, des artistes, des festivals, il encourage les échanges internes. La crise est telle pour les compagnies qu’un groupe de travail ad hoc a été réactivé entre équipes artistiques et lieux. L’objectif est d’aboutir à une charte de bonnes pratiques dont nous espérons qu’elle puisse inspirer à court terme les politiques du ministère de la Culture. La solidarité active du secteur doit être encouragée pour que, de cette crise de l’écosystème, naissent des solutions plus vertueuses socialement, plus responsables écologiquement, plus saines professionnellement, afin que les structures culturelles que nous représentons puissent, dans de meilleures conditions, faire leur travail auprès de toute la population, sur tous les territoires.
Protéger la liberté de création, de diffusion et d’expression
Les artistes font face à des risques nouveaux, qui se développent de façon directe ou insidieuse et qui poussent à des formes de censure ou d’autocensure. Des cas de déprogrammation sont de plus en plus fréquemment signalés, notamment en raison de pressions extérieures. L’importance de soutenir les artistes, les programmateurs face aux ingérences politiques et sociales et aux tentatives de censure et d’empêchement, constitue un nouveau défi pour le spectacle vivant public.
Le paysage actuel du spectacle vivant nécessite des ajustements profonds pour soutenir de manière efficace et durable les artistes. Qu’il s’agisse de repenser le maillage culturel, de mieux répartir les ressources ou de protéger la liberté de création, chaque acteur – État, collectivités territoriales, programmateurs et lieux culturels – doit jouer son rôle. Un soutien inclusif et sur le long terme permettra non seulement de préserver la diversité artistique, mais aussi de renforcer la vitalité culturelle au sein des territoires.