Texte rédigé par Anne Monfort, compagnie day for night, élue au Bureau du Syndeac
Tous les Théâtres Nationaux sont dirigés par des hommes.
À la DGCA, six hommes, six directeurs et un délégué au Ministère.
Depuis un an, ont été nommés 5 hommes et 3 femmes dans les Scènes Nationales, 5 hommes et 2 femmes dans les Centres Dramatiques Nationaux.
Car les chiffres comme toujours racontent qu’il ne s’agit pas de personnes, mais d’un effet de système.
On peut parler du plafond de verre qui empêche les femmes de candidater car elles auraient besoin d’x années de psychanalyse pour se sentir légitimes (en général elles les ont déjà faites).
Mais là n’est à mon sens pas le problème.
Dans ce cas, on peut aussi parler du fait qu’un appel à projet d’architecte est rémunéré contrairement au travail des candidat.e.s. à des lieux labellisés qui construisent un dossier, et que les femmes qui y font le plus souvent de la figuration ne perçoivent même pas le cachet minimum de 84,50 euros par jour. (1)
On sait depuis longtemps que les processus de sélection tels qu’ils existent aujourd’hui défavorisent les femmes (étrangement, l’absence d’oral au concours de Normale Sup cette année fait entrer plus de femmes dans cette noble institution).
On sait aussi que les jurys, qu’ils craignent telle mouvance politique, tel équilibre local, sont amenés, pour sauver les outils, à choisir ce qui rassure, donc souvent ce qu’on reconnaît, rarement ce qui est différent, voire divers…
On pourrait aussi parler du fait que, pour l’ensemble de la création artistique, les critères économiques ne se réfèrent qu’à un choix de « réseau », et donc d’entre-soi qui crée la reproduction du même.
Les collectivités territoriales et les représentant.e.s de l’État ne pouvant pas réguler la parité, il faut les aider ! Faut-il engager les hommes à ne plus candidater aux directions de lieux tant que les directions ne seront pas équilibrées en termes paritaires ?
Hommes artistes, ne vous inquiétez pas, les femmes directrices vous prendront comme artistes associés, la parité est inscrite dans les cahiers des charges !
Plus généralement, c’est une question d’avenir, de dialogue avec le monde. Si le projet est que nos institutions, structures comme compagnies, ne soient que des espaces destinés à s’auto-légitimer et non des centres d’art et de création où peuvent émerger de nouvelles formes, de nouveaux modes de gouvernance, cela s’appellera des musées (2). Remarquez, si c’est l’avenir est-ce qu’on pourrait être classés comme musées assez rapidement, histoire de rouvrir plus vite ?
Anne Monfort, compagnie day for night, élue au Bureau du Syndeac
(1) Cachet minimal de figuration en audiovisuel.
(2) Cf Lionel Ruffel sur la différence entre centres d’art et musées.
Photo de Katell Daunis